Les Forges contre la futaie

La mise en œuvre de la concession
La première année d'application de cette concession fut...1789 ! A peine quelques mois plus tard, les maîtrises des Eaux et Forêts sombraient dans le bouillonnement révolutionnaire. Ce fut le point de départ d'une période de troubles et d'abus forestiers qui ne cessèrent que peu à peu sous l'Empire, avec la création de l'administration des Eaux et Forêts en 1801.
Ainsi cette nouvelle ère forestière à Tronçais débute-t-elle sur des bases très déséquilibrées. Un témoignage nous en est donné par Pierre Pigeon, garde général de la ci-devant maîtrise (3), placé sous l'autorité directe du commissaire du district Bourderye, ce même Bourderye qui deviendra par la suite sous-inspecteur des forêts.
Dès 1793, il constate que les loges d'ouvriers se multiplient en forêt, que celles ci abritent force chèvres et autre bestiaux qui en font la ruine. Il se plaint que les coupes des années 1788 et 1789 sont toujours en exploitation avec des chênes coupés ça et là, des rejets poussés sur les souches...Cette façon de procéder porte un tort irréparable aux intérêts de la république. Il propose la confiscation des bois conformément à l'ordonnance de 1669. Il ne sera pas suivi.
En 1794, il signale que des vastes étendues des triages de Montaloyer et des Landes Blanches sont en très mauvais état, dû en grande part aux quantités de voitures et mulets pour la conduite des charbons aux forges de Charenton, Grossouvre et Saint Jean de Bouys.
L'année suivante, il produit un état nominatif des ouvriers et autres personnes habitant la forêt nationale de Tronçais, par triage et commune. Recensement partiel puisqu'il ne concerne que les triages de l'Armenange, la Goutte Dardant, Meslier et Landes Blanches. 132 loges sont citées, pour 113 d'entre elles il indique le nombre de personnes ainsi que le cheptel domestique. Cela représente 406 habitants, surtout sabotiers, fendeurs (de merrain), mais aussi commis, laboureurs. Aux Landes blanches ne sont cités que des voituriers et dresseurs (de meules). Quant aux animaux, il s'agit de 8 chevaux, 47 vaches, 96 chèvres et 56 cochons. Jamais sans doute la forêt n'avait connu un tel niveau de population. On imagine assez bien l'état de la forêt aux abords de ces loges...
Il faut dire un mot ici de la coupe extraordinaire de l'an II, réclamée par la convention dans toutes les forêts du territoire de la république (4). Les forges devaient en être les premières bénéficiaires au vu de l'effort de guerre sans précédent. Il y a bien eu une telle coupe à Tronçais, portant sur 200 arpents dans la Réserve (la Grande Vente), et qui est restée mémorable de par la longueur des délais d'exploitation (les bois furent finalement saisis en l'an IX), mais elle n'a à priori pas directement profité aux forges de Tronçais. L'acquéreur était un dénommé Toussaint.
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